« Ne pas soutenir les pays les plus pauvres dans la lutte contre le Covid-19 serait à la fois cruel et déraisonnable »
Un temps préservée par la pandémie du coronavirus – le continent africain a été touché en février avec un premier cas avéré en Égypte – l’Afrique doit désormais faire face à une progression rapide de l’épidémie, comparable à celle observée en Chine et en Europe. Partout sur le continent, les autorités prennent des mesures, plus ou moins restrictives, pour éviter l’arrivée du virus dans leur pays ou freiner sa propagation. Mais nombre de ces pays ne sont pas préparés et moins bien armés que la Chine ou l’Europe pour combattre le virus. A l’ampleur des besoins nationaux, s’ajoutent les difficultés d’importation des équipements et des produits médicaux dans un contexte de forte demande et de perturbation du trafic aérien.
Le confinement n’est pas facile à mettre en œuvre dans des villes surpeuplées, pour des familles vivant dans de petits espaces ou des personnes dont la survie dépend d’un salaire journalier. Dans certaines zones, l’accès à l’eau propre, au savon ou à des soins hospitaliers est loin d’être garanti. La production et la circulation des semences et des produits agricoles posent aussi de graves problèmes en particulier dans les régions en état d’insécurité alimentaire.
Le Burkina Faso a déclaré l’état d’alerte sanitaire depuis la fin mars et décidé de mettre les villes touchées en quarantaine. Au niveau national, les frontières et aéroports sont fermés à l’exception du fret, un couvre-feu a été instauré entre 19h00 et 5h00 du matin, les établissements scolaires, marchés, bars et restaurants sont fermés, les rassemblements interdits et les transports publics suspendus. Parallèlement à ces mesures d’urgence, des chercheurs burkinabè et béninois mènent des études sur l’usage de la chloroquine dans le traitement du Covid-19, à l’image du Maroc et du Sénégal.
Dans ce contexte nos partenaires locaux s’organisent et s’adaptent pour continuer leurs activités sur le terrain
A Zambélé, le complexe scolaire est actuellement fermé mais les travaux de mise en place du lycée se poursuivent. Le contrôleur technique a encore visité le chantier avant la mise en quarantaine de Ouagadougou et apprécié les progrès. Les réunions de chantier sont suspendues depuis mars pour se conformer aux mesures de précaution, et seules des rencontres ponctuelles (et à distance) sont maintenues avec les principales entreprises impliquées venant de Koudougou et de Yako, ces deux villes n’étant pas touchées par le coronavirus ni mises en quarantaine.
En ce qui concerne le projet de promotion de la culture attelée asine, mis en œuvre par la FEPAB (Fédération des Professionnels Agricoles du Burkina)) dans 4 différentes provinces et 26 villages, là aussi les activités prévues se poursuivent dans les zones rurales : l’animation des groupes CEF (Conseil à l’exploitation familiale), les sessions de formation des producteurs sur l’utilisation du duo âne-kassine et le processus de mise en place des CUMA (Coopératives d’utilisation du matériel agricole). En l’absence de l’équipe du projet, Ouaga étant placée en quarantaine, ce sont les animateurs locaux de la FEPAB et les formateurs-relais dans les villages qui ont mis à profit leurs compétences et assuré la conduite des activités. Ces animateurs et formateurs ont également été chargés de sensibiliser les populations sur le coronavirus et sur les mesures de précaution à prendre pour éviter sa propagation.
Si pour l’instant les activités entamées se poursuivent, nous ne savons pas combien de temps cette pandémie va durer ni quelle sera son ampleur réelle au sein de la population locale. A ce stade, les projets sont menés pas à pas et les nouvelles activités en suspens, toujours en étroite collaboration avec nos partenaires locaux.
Cette crise sanitaire mondiale a/aura aussi des conséquences sociales, économiques et politiques encore difficiles à cerner aujourd’hui. Les pays les plus faibles, qui nécessitent déjà un appui au développement et dont les systèmes de santé sont parmi les plus fragiles, risquent d’être les plus affectés alors même que certains d’entre eux font aussi face aux troubles de la guerre ou du terrorisme.
Conjointement avec l’ONU, l’Organisation mondiale de la santé (www.facebook.com/WHO/), par la voix de son directeur général Tedros Ghebreyesus, a appelé toutes les nations, surtout les plus riches, à prendre conscience que le problème ne s’arrête pas à leurs frontières et à agir pour devancer la pandémie: « Ne pas soutenir les pays les plus pauvres dans la lutte contre le Covid-19 serait à la fois cruel et déraisonnable ». Non seulement des millions de vies sont en danger, mais le virus pourrait à nouveau faire le tour du monde.
Jacqueline MONVILLE
Chargée de projets